Jean-François Millet

( les glaneuses et l’angélus )

Après avoir été faucheuses
Au regard du propriétaire,
Après avoir été lieuses
En ce domaine autoritaire,
Elles devinrent les glaneuses
Où la pauvreté dut se taire.

Pour un couple de bienheureux
L’angélus appelle au pardon,
Il invite à baisser les yeux
Vers le sol, en communion
Avec le mystère des cieux
Qui doit protéger la moisson.

Sur une assiette en porcelaine,
A la lueur d’un feu qui danse,
On voit les glaneuses, sans peine,
Immobiles dans le silence.
Inerte, le rouet de laine
Est un décor de la prestance.

La seule foi qui soit encor
Est la croyance en ces tableaux ;
L’un comme l’autre sont en or…
Robustes, modestes ruraux,
Vous héritez d’un curieux sort
Etant fragiles en châteaux.

11 novembre 1975